20200611- LA CROIX : Tir de missile

Bretagne : mobilisation contre des essais de tirs de missiles nucléaires

Les faits : Des sous-marins français vont procéder à des essais de tirs de missiles nucléaires au large des côtes du Finistère d’ici à la mi-juillet 2020. Le Mouvement de la paix, une ONG créée en 1948, a organisé des piquets de protestation et des « pique-niques pour la paix ».

Le sous-marin « Le Terrible » en juillet 2017. FRED TANNEAU/AFP

Des essais de tirs de missiles nucléaires vont avoir lieu entre le 10 juin et la mi-juillet, au large du Finistère, a déclaré le 10 juin le ministère des armées. Les missiles mer-sol balistiques stratégiques, dépourvus de leur tête nucléaire, seront lancés depuis des sous-marins nucléaires lanceurs d’engin (SNLE), stationnés au sud de la pointe de Penmarc’h. La préfecture maritime de l’Atlantique y a restreint la navigation, le mouillage, la plongée, la pêche et les activités nautiques.

Une nécessaire modernisation de l’arsenal nucléaire selon le gouvernement

« Il n’y aura pas de communication détaillée sur ces activités puisque les activités opérationnelles et les essais de systèmes d’armes liés à la dissuasion nucléaire sont couverts par le secret-défense », a indiqué le ministère à l’Agence France Presse (AFP), précisant qu’il s’agissait « d’activités opérationnelles classiques qui se tiennent dans le cadre de la remontée en puissance des SNLE suite à leur sortie d’indisponibilité périodique pour entretien et réparation ».

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Ces essais se déroulent aussi dans le cadre de la modernisation de l’arsenal nucléaire français, a ajouté le ministère. Les missiles M51, de nouvelle génération, mesurent douze mètres de long, 2,3 mètres de diamètre, et pèsent 56 tonnes. Ils possèdent une portée de 6 000 kilomètres. Ils coûtent, à l’unité, 120 millions d’euros. L’ogive de ces fusées peut contenir jusqu’à dix bombes nucléaires, d’une puissance dix fois supérieure à celle d’Hiroshima. Chacun des SNLE en embarque 16.

Une « obscénité » pour ces opposants

« La crise sanitaire a montré que nous manquions de moyens pour la médecine et la recherche. On était en droit d’attendre que le gouvernement fasse preuve de raison et stoppe l’augmentation du budget de la défense nucléaire – passé de 3,2 milliards d’euros en 2017 à 7 milliards en 2021-2022 – pour mettre ces crédits au service de la santé. 120 millions d’euros, le prix d’un missile, équivalent au salaire de 7 500 infirmières, ou au prix de 24 000 respirateurs médicaux », s’insurge Roland Nivet, porte-parole du Mouvement de la paix.

Cette organisation, qui revendique 3 500 membres en France, a organisé des piquets de protestation et des « pique-niques pour la paix » à Penmarc’h, Rennes, Nantes, Saint-Malo ou Morlaix. Elle rappelle que le pape François, lors de son déplacement à Nagasaki et Hiroshima en 2019, avait déclaré que « l’utilisation de l’énergie atomique à des fins militaires est aujourd’hui plus que jamais un crime, non seulement contre l’homme et sa dignité, mais aussi contre toute possibilité d’avenir dans notre maison commune ».

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Ces essais sont « une obscénité en ces temps de pandémie », estime dans un communiqué la Fédération antinucléaire de Bretagne. « Cette reprise des essais est en contradiction totale avec le traité de non-prolifération, qui reconnaît que certains États peuvent détenir l’arme nucléaire à condition que ceux-ci réalisent de « bonne foi » un processus de désarmement nucléaire », ajoute l’association.

Lors d’un précédent essai, en 2013, un missile M51 avait explosé quelques secondes après son lancement, à 25 kilomètres des côtes bretonnes. Cet échec, intervenu après cinq tirs réussis, avait empêché la pratique de la pêche pendant plusieurs mois.

Raphaël Baldos,